L'Institut professionnel de la fonction publique du Canada

98e assemblée générale annuelle Discours de la présidente

Le 17 novembre 2017

(Le texte prononcé fait foi)

 

Mes chers collègues et amis, bienvenue à notre 98e assemblée générale annuelle! « La meilleure fonction publique du monde », c’est notre thème de cette année. Et avec raison.

Au début de l’année, les conclusions d’une étude internationale faisaient de la fonction publique canadienne la meilleure du monde.

Je pense que nous avons aussi l’un des syndicats les plus efficaces du monde! Voici, par exemple, trois de nos grandes réalisations cette année :

 

2017 AGA

  • Ensemble : nous avons négocié des dispositions qui protègent les scientifiques du musellement;
  • Ensemble : nous avons réussi à ajouter dans notre convention collective une disposition qui réduit le recours excessif du gouvernement fédéral à la sous-traitance;
  • Ensemble : nous avons sauvé le régime de congés de maladie fédéral et saisi l’occasion de négocier des améliorations concrètes.

Mais ce n’est pas tout.

La Régie des hôpitaux du Yukon a signé sa première entente négociée.

et les procureurs du Nouveau-Brunswick ne sont plus les procureurs les moins bien payés du pays.

Les membres du groupe Professionnels des technologies de l’information de l’Université d’Ottawa ont récemment conclu une entente de principe avec leur employeur, évitant ainsi une grève.

Et nos victoires n’ont pas été remportées qu’à la table de négociations!

Le réinvestissement dans l’Agence du revenu du Canada que nous réclamions depuis si longtemps est enfin prévu dans le budget fédéral.  

Nos protestations contre le projet de loi C-27, qui menaçait les pensions fédérales à prestations définies, une des meilleures protections du revenu de retraite de la classe moyenne, ont atteint leur cible.

Ces initiatives et ces réalisations sont généralement essentielles non seulement pour nos membres, mais aussi pour le bien collectif, pour reprendre les mots d’Alex Himelfarb.

Comme la plupart des Canadiens, nos membres ne veulent pas que nous perdions notre temps avec des querelles intestines insignifiantes. Ils ont besoin que nous gardions nos forces pour les grandes batailles, celles où nous défendons leurs intérêts et ceux de tout le monde.

Nous avons défendu la négociation basée sur les intérêts communs, le regroupement des revendications et le renforcement de la solidarité entre nos groupes, et ce travail a été profitable à nos membres et à tous les Canadiens.

Les politiques publiques plus objectives et justifiées par la science sont bonnes pour tout le monde, tout comme un régime fiscal capable de contrer l’évitement fiscal. Tout comme un gouvernement qui donne des emplois syndiqués, permanents et à temps plein à des professionnels.

Il faut donc continuer à suivre le modèle d’action concertée offert par notre Comité stratégique des négociations si nous voulons être en mesure de défendre plus efficacement les enjeux de nos membres, tels qu’une sécurité d’emploi véritable, de meilleurs congés de maladie et des pensions plus sûres, et d’ouvrir la voie de la victoire à d’autres Canadiens.

C’est ce que je vais continuer à défendre en 2018, à titre de présidente de l’Institut et de nouvelle vice-présidente du Comité exécutif du Congrès du travail du Canada.

Je suis très fière de ce que nous avons accompli cette année et de ce que nos membres réalisent tous les jours pour les Canadiens.

Je me dis que d’autres méritent d’apprendre cette bonne nouvelle et de s’en réjouir.  

C’est pourquoi nous lançons cette année le premier numéro d’une nouvelle publication, Bien mieux ensemble, qui met en vedette nos membres, la variété du travail qu’ils font et leur valeur pour les Canadiens. Nous en avons donné un exemplaire à tous les députés. Nous avons aussi produit une série de vidéos d’accompagnement. Quelques-uns vous seront montrés à différents moments de l’AGA. Enfin, nous avons lancé une campagne publicitaire dans les abribus, les immeubles de bureaux et le Web.

Mais ne nous assoyons pas sur nos lauriers; il faut travailler ensemble à rester les meilleurs.

Le Centre canadien de politiques alternatives faisait remarquer l’an dernier que la dernière fois que l’appareil gouvernemental fédéral était aussi réduit, c’était avant la Deuxième Guerre mondiale. Il faut que ça change si nous voulons être de taille à relever les défis de l’avenir.

Nous poursuivons donc nos efforts pour convaincre le gouvernement fédéral d’investir davantage dans la fonction publique canadienne.

Dans notre mémoire de consultation prébudgétaire au Comité des finances du gouvernement fédéral, nous avons demandé au gouvernement de faire trois choses :

  • Redonner sa place à la science publique au Canada;
  • Réduire la sous-traitance excessive des services gouvernementaux;  
  • Assurer l’intégrité de notre système fiscal.

Pour faire ce qui mérite d’être bien fait, il faut de l’argent. Mais avant tout, il faut que nous convainquions les politiciens de l’importance de ces trois choses. C’est ainsi que le mois dernier nous avons transmis ce message directement aux députés sur la Colline du Parlement.

J’adore ça quand les ministres posent pour nous et qu’on les voit tenir notre message sur une photo.

Nous avons fait beaucoup de progrès sur bien des fronts, c’est certain.

Mais il y a un point où nous devons faire beaucoup plus.

Vous savez de quoi je parle.

La meilleure fonction publique du monde mérite bien mieux que le système de paye Phénix.

Le 8 août, 156 035 employés fédéraux, soit plus de la moitié des employés de la fonction publique, avaient déjà ouvert un dossier en raison d’une paye mal calculée par Phénix.

Et le problème empire... Hier, le gouvernement a envoyé un courriel à tous ses employés les informant que c’est désormais plus d’un demi-million de transactions de paye qui sont en souffrance.

Les coûts du contrat avec IBM ont explosé, passant de 5,7 M$ en 2011, année où IBM a été chargée de développer et de mettre en œuvre Phénix, à 185 M$ en 2017.

Évidemment, ces chiffres ne rendent pas compte du stress des employés, dont certains n’ont pas été payés depuis des mois.

Au printemps dernier, l’Institut a déposé deux griefs de principe contre l’employeur. C’est le seul recours juridique dont nous disposons pour le contraindre à réparer Phénix et à indemniser correctement tous nos membres touchés.

Nous avons déposé trois autres griefs collectifs cet automne, quand le gouvernement fédéral n’a pas respecté ses obligations de mettre en œuvre la nouvelle convention collective des membres des groupes AV, RE et SP. Nous sommes sur le point de déposer deux autres griefs collectifs semblables au nom des membres des groupes CS et SH.

Et ça, c’est en plus d’avoir aidé littéralement des milliers de membres à déposer des griefs individuels, dont la plupart ont été réglés. De plus :

  • nous avons écrit aux ministres et nous les avons rencontrés;  
  • nous avons réussi à faire valoir que les membres doivent se faire rembourser leurs dépenses légitimes;
  • nous avons travaillé avec les médias pour qu’ils continuent d’attirer l’attention du public sur ce problème;
  • nous avons offert des prêts aux employés les plus durement touchés;
  • nous avons organisé la plupart des manifestations de nos membres;
  • et nous avons exercé des pressions – avec succès – pour que plus d’argent soit consacré à la réparation du système Phénix.

À la fin de juin, j’ai rencontré le nouveau groupe de travail ministériel chargé d’arranger Phénix. J’ai préconisé une collaboration plus étroite entre le gouvernement et des membres du groupe CS pour trouver des solutions. J’espère encore que cette collaboration permettra non seulement de mettre fin à cette saga, mais aussi de mieux faire apprécier la contribution professionnelle de nos membres et de changer les pratiques de sous-traitance du gouvernement.

Mais il y reste un problème.

Je ne connais personne qui aime Phénix. Mais vraiment personne. Nos membres ne l’aiment pas. Nous ne l’aimons pas. Les contribuables ne l’aiment pas. Rick Mercer ne l’aime pas. Je suis sûre que le groupe de travail ministériel mis sur pied pour l’arranger ne l’aime pas non plus. 

Alors, pourquoi le défendre?

Phénix ne marche pas parce qu’il n’a pas été conçu pour fonctionner dans une organisation aussi grande, aussi complexe et, avouons-le, aussi susceptible aux changements idéologiques et aux pressions financières que la fonction publique fédérale.

Ce n’est pas la faute de la fonction publique. Et ce n’est certainement pas la faute de la négociation collective.

C’est la faute du dernier gouvernement, qui voulait réduire les coûts salariaux et remettre le travail de nos membres à des sous-traitants. C’est la faute du gouvernement actuel de ne pas avoir compris l’erreur de l’ancien gouvernement suffisamment vite pour abandonner le projet. Et c’est la faute d’un aveuglement ou d’une politique aberrante de renouvellement sans fin de contrats avec des entreprises privées qui peuvent faire gonfler leurs factures à souhait.

En fait, les seuls qui aiment vraiment Phénix, ce sont ceux qui en tirent profit. Ça vous étonne, vous?

Au début du mois, nous avons soumis nos membres à un petit sondage maison pour savoir s’ils pensent qu’on peut arranger Phénix. Eh bien, ils ont répondu non à 87 pour cent.  

Ce résultat ne devrait étonner personne. En tout cas, moi, je ne le suis pas.  

C’est pourquoi au début de la semaine, j’ai demandé au gouvernement de laisser tomber Phénix, d’arrêter l’hémorragie financière et d’investir dans un nouveau système. Un système qui marche. Un système qui a été mis à l’essai. Un système créé par et pour les fonctionnaires.

Ce système pourra être basé sur le même programme PeopleSoft. Il ne sera pas bon marché. Et il ne sera pas prêt du jour au lendemain. En revanche, cette solution coûte moins cher et elle est plus rapide et efficace à long terme que le rafistolage sans fin d’un mauvais système programmé pour l’échec dès le départ.

Et surtout ce système marchera.

Entre-temps, nos membres doivent être payés et leur paye doit être calculée au bon montant. La seule solution qui semble s’imposer, c’est que le gouvernement investisse maintenant dans l’embauche de plus d’employés qui régleront les problèmes de paye des membres.

C’est pourquoi nous demandons aux membres de nos équipes de consultation de rencontrer leur direction et d’exiger simplement ceci : embauchez plus de personnel pour aider les membres ou nous vous bombarderons de griefs.

D’ici à ce que nos membres développent un nouveau système fonctionnel, notre seul espoir de régler ces problèmes constants, c’est l’embauche de plus de personnel ou la menace de plus de griefs.

Nos délégués syndicaux jouent un rôle essentiel dans cette initiative. Nous leur avons donc préparé une trousse spéciale pour la préparation de griefs liés à Phénix. Ils pourront la télécharger à l’aide de leur compte portail à compter du lundi 20 novembre. Ces trousses leur montreront, étape par étape, comment aider les membres à déposer plus de griefs au besoin.

Nous soutenons depuis le début que les problèmes de Phénix sont causés par le recours excessif à la sous-traitance. L’espoir d’arranger Phénix est entre les mains des informaticiens fédéraux et non de ceux d’IBM. L’espoir d’avoir un système qui fonctionne à plus long terme repose aussi sur la conception et la mise en œuvre d’un nouveau système par les professionnels de l’informatique fédéraux. Et tout espoir de trouver des solutions immédiates dépend de nos efforts à forcer le gouvernement à embaucher maintenant plus de personnel, en l’avertissant que s’il ne le fait pas, il fera face à plus de griefs.

Cette saga n’a pas à finir mal. Nous avons vu ce que nous pouvons faire quand nous travaillons ensemble. Nous avons négocié et réussi à empêcher le musellement des scientifiques, à réduire la sous-traitance et à sauver les congés de maladie. Nous pouvons exercer les mêmes pressions concertées pour sauver nos membres de Phénix.

Comme syndiqués, Canadiens et employés de la fonction publique, nous avons les compétences et les ressources pour améliorer la vie des autres.

En fait, l’un des nouveaux outils les plus prometteurs que l’Institut vient de lancer est un nouveau site Web, enaction.ipfpc.ca, conçu pour les membres qui cherchent à s’impliquer davantage à l’Institut. Il présente des avis d’activités spéciales pour les membres, des sondages et d’autres moyens qui vous permettent de participer davantage aux affaires de l’Institut. On peut y visionner les entrevues sur vidéo des membres dont le profil figure dans notre revue Bien mieux ensemble. On peut aussi y signer notre pétition en ligne pour demander au gouvernement d’investir davantage dans la fonction publique du Canada.

La mobilisation des membres à cet égard est importante, car peu importe notre efficacité individuelle, notre réussite à titre de professionnels de la fonction publique se mesure par ce que nous réalisons ensemble.

Bien mieux ensemble, c’est bien plus qu’un slogan. C’est une promesse et une mesure de notre succès collectif. Comme le montrent nos réalisations de la dernière année et les défis qui nous attendent, nous sommes bien mieux ensemble.

Merci.

Discours d’ouverture de la présidente