L'Institut professionnel de la fonction publique du Canada

Discours de la présidente à l’AGA 2018

(Le texte prononcé fait foi)

Bonjour mes amis, collègues, confrères et consœurs,

et bienvenue à notre 99e AGA! (Il s’en vient vite, le centenaire! L’année prochaine sera très spéciale!)

Quand je regarde ce que nous avons fait cette année, je peux voir qu’une bonne grande de nos réalisations découle d’une bonne planification à long terme, commencée bien avant 2018 et même bien avant les élections fédérales de 2015. Je vois aussi que l’entretien de ces relations vitales, rendues plus fortes par les revers comme par les réussites, a beaucoup favorisé ces réalisations.  

Même si nos relations les plus importantes sont d’abord et avant tout avec vous, les membres, la création et le maintien de bonnes relations avec les décideurs gouvernementaux, les syndicats, les médias, les ONG et d’autres intervenants sont également essentiels à notre succès. 

Du côté de la science, nous avons beaucoup progressé! Cet été, le gouvernement fédéral a adopté notre modèle de politique sur l’intégrité scientifique, qui oblige les ministères à respecter les normes et les pratiques scientifiques. C’est l’aboutissement de nos efforts relationnels, entre autres, entrepris avant les dernières élections. À ce moment-là, les compressions budgétaires et le musellement des scientifiques laissaient planer de sérieux doutes sur l’intégrité scientifique au gouvernement. Des scientifiques d’un peu partout dans le monde ont reconnu cette menace et nous ont donné leur appui.

Le gouvernement Trudeau a promis d’adopter d’ici la fin de l’année des politiques sur l’intégrité scientifiques fondées sur notre modèle de politique.  C’est vraiment une belle victoire pour nos membres et tous les Canadiens!

Les sondages jouent un rôle essentiel en nous aidant à étayer nos discussions par des faits et des témoignages directement fournis par nos membres. Ils nous aident à valider nos préoccupations, à amplifier notre voix et à engager la conversation.

C’est ce que la publication des rapports Coup de froid sur la science et La désintégration de la science publique nous a appris en 2014.

Notre rapport d’enquête, Le lent dégel de la science publique, publié en février 2018, qui suit les progrès du démusellement des scientifiques fédéraux, a beaucoup attiré l’attention des médias. Il a également mis en évidence ce que le gouvernement doit encore faire pour réellement démuseller ses scientifiques. Oui, aujourd’hui beaucoup moins de scientifiques fédéraux se sentent « muselés » qu’en 2013, mais lorsque plus de la moitié (53 %) se disent encore incapables de s’exprimer librement, nous savons qu’il faut faire plus pour sensibiliser les membres et les gestionnaires sur leurs droits et leurs obligations.

Notre rapport Les femmes en science confirme certains obstacles toujours présents pour les femmes scientifiques et plus particulièrement les plus jeunes, deux fois plus susceptibles que leurs aînées de percevoir un préjugé sexiste dans un processus d’embauche. Il faut faire tomber ces obstacles.

Oui, les sondages sont importants.

En ce qui concerne l’équité fiscale, cette année l’attention portait sur nos 12 000 fiscalistes de l’Agence du revenu du Canada. Même si le gouvernement Trudeau a considérablement réinvesti dans l’Agence, 500 M$ manquent toujours à son budget depuis 2012, année où le gouvernement Harper en a radicalement réduit le budget et le personnel.

C’est pourquoi il est si difficile pour nos membres de défendre l’équité fiscale. Comme l’a montré notre dernier rapport, Le Jeu de coquilles vides, les paradis fiscaux à l’étranger, les échappatoires et les compressions budgétaires fédérales nuisent plus que jamais à l’équité fiscale. Ainsi, 79 % des Canadiens et 90 % des membres pensent qu’une entreprise ou un particulier fortuné peut se soustraire plus facilement à ses responsabilités fiscales que le Canadien moyen.

Défendre l’équité fiscale doit donc devenir une priorité pour l’Institut et le gouvernement.

Ce rapport a lui aussi beaucoup fait parler de lui dans les médias et il justifie les fonds supplémentaires que nous demandons dans le budget de l’an prochain, car nous voulons que le gouvernement améliore la formation de nos membres et la technologie dont ils disposent.

Les partenariats avec les ONG jouent aussi un rôle important.

Cette année, nous avons continué à bénéficier de l’appui d’organismes tels qu’Évidence pour la démocratie sur la question de l’intégrité scientifique, le Centre canadien de politiques alternatives sur celle du réinvestissement dans la fonction publique et Canadiens pour une fiscalité équitable sur le réinvestissement dans l’Agence.

Les partenariats avec le gouvernement ont aussi leur importance. (Après tout, qu’est-ce qu’une convention collective, sinon un partenariat?)

Bien sûr, Phénix met ces partenariats à rude épreuve. L’an dernier, en conférence de presse, j’invitais le gouvernement à laisser tomber Phénix et à créer un système de paye qui marche. À ce moment-là, notre sondage montrait que 87 % de nos membres avaient perdu tout espoir de voir Phénix bien fonctionner un jour. Il était donc logique de presser le gouvernement à le remplacer au plus vite.

Je ne pense pas surestimer notre influence en disant que le gouvernement n’aurait jamais décidé de dépenser 16 M$ ce printemps pour trouver un autre système si nous n’étions pas intervenus publiquement et n’avions pas fait du lobbying en personne et en ligne par la suite.

La décision plus récente de moderniser et d’accélérer l’acquisition d’un nouveau système n’aurait pas non plus été prise sans les discussions que nous avons eues, le président du Conseil du Trésor, Scott Brison, et moi.

C’est pourquoi l’Institut travaille maintenant en partenariat avec le gouvernement pour trouver un autre système. Et le gouvernement a laissé entendre que la mise à l’essai de systèmes commencera bientôt et que le système de remplacement sera choisi au printemps prochain.

Oui, les relations sont importantes.

La dernière ronde de négociations fédérales a été longue et ardue et a montré jusqu’à quel point les bonnes relations sont importantes pour l’obtention de bons résultats. Car en plus de faire reconnaître la liberté d’expression des scientifiques et l’importance d’adopter des politiques d’intégrité scientifique, nous avons obtenu un libellé très ferme pour limiter la sous-traitance. Nous avons protégé les congés de maladie. Et nos manifestations nous ont rendu les droits de négociation que le gouvernement Harper nous avait enlevés.  

Cette année, avec d’autres syndicats, nous avons également bonifié notre assurance santé, qui couvre maintenant plus de moyens de contraception, et obtenu le remboursement en ligne tant attendu des demandes liées au Régime de soins de santé de la fonction publique fédérale. Les membres peuvent maintenant soumettre en ligne leurs demandes de remboursement pour soins de la vue et physiothérapie. Les moyens de contraception ne se limitent plus à la pilule :  enfin, du progrès! Et grâce à nos relations plus solides, ces améliorations si nécessaires ne seront pas les dernières que nous négocierons.

Je suis fière de vous dire aussi que les choses ont avancé cette année concernant les nouvelles modalités de la prochaine ronde de négociations fédérales. Les nouveaux protocoles convenus avec le gouvernement devraient accélérer le processus de négociation et nous aider à cibler les négociations sur nos demandes tout en donnant meilleure satisfaction aux deux parties.

Évidemment, le vrai progrès prend du temps et n’arrive généralement pas sans opposition. Par exemple, la lutte pour des pensions équitables est loin d’être terminée, comme le savent très bien nos membres du gouvernement néo-brunswickois et des laboratoires nucléaires de Chalk River en Ontario et de Whiteshell au Manitoba. La manifestation à laquelle nous avons participé avec d’autres syndicats à l’extérieur des bureaux du Conseil du Trésor, en juin dernier, a clairement fait comprendre au gouvernement notre détermination à protéger et à rétablir le régime de pension à prestations déterminées de nos membres.

Et nous sommes plus déterminés que jamais à conclure une entente au nom des membres de notre groupe S&A de l’Agence canadienne d’inspection des aliments. Leur convention collective a expiré depuis trop longtemps.

Il faut s’attaquer à cette tendance marquée des bureaux ouverts, qui nuit à la productivité et à l’efficacité, selon 62 % de nos membres professionnels, et qui rend plus difficile la concentration, selon 79 % de ces membres. Ils signalent aussi que la nouvelle configuration des bureaux a empiré les choses à tous points de vue, qu’on parle de santé mentale, de productivité, de collaboration ou d’intimité.

Mais comme en fait foi la nouvelle loi fédérale sur l’équité salariale annoncée cette semaine, nous pouvons progresser même si tout cela prend du temps.

Bien sûr, rien de ce que nous avons fait cette année n’aurait été possible sans vos contributions remarquables. J’aimerais maintenant souligner les contributions de quelques membres. Merci à :

  • Del Dickson, pour sa constance à promouvoir la coupe Héritage;
  • Ginette Tardif, pour son travail exceptionnel sur Phénix et la mise en œuvre de contrats;
  • L’équipe de travail sur la violence familiale, pour son travail novateur en faveur des victimes de violence familiale;
  • Le Comité de négociation stratégique, pour son travail de soutien à la table centrale et à la modernisation du processus de négociation;
  • Matt MacLeod et Judith Leblanc, pour leur travail avec la conseillère scientifique en chef sur l’élaboration d’un modèle de politique et de lignes directrices sur l’intégrité scientifique;
  • Mike Pauly et Jonathan Fitzpatrick, pour leur travail inlassable sur la sauvegarde des pensions.

Enfin, je tiens à remercier ceux et celles parmi vous qui continuent de s’investir dans notre travail et de le faire à l’unisson, malgré les divergences occasionnelles sur l’orientation à prendre. Vous nous rendez plus forts!

Nos réalisations de la dernière année illustrent toute l’importance des bonnes relations et de la planification à long terme, comme celle du courage de garder le cap malgré les obstacles et les revers occasionnels.

Nous avons beaucoup de raisons d’être fiers de cette année, comme le prouve cette vidéo.

Malgré tous nos succès, nous ne pouvons pas nous asseoir sur nos lauriers. Des difficultés persistantes et futures nous attendent.  Il faut entretenir nos relations de longue date et en nouer de nouvelles.

C’est aussi pourquoi j’ai pris le temps cette année de parler relations de travail avec des étudiants de l’École de gestion Telfer et de l’Université d’Ottawa. Comprendre dès le départ l’importance de la consultation et de la coopération peut éviter à nos membres mais aussi au gouvernement et au public de se lancer ensuite dans des griefs dispendieux. C'est une leçon que tout aspirant-cadre devrait apprendre avant d’entrer dans la fonction publique. 

À la fin de novembre, j’irai à la quatrième conférence annuelle du Centre Pearson pour des politiques progressistes pour y parler des enjeux que le gouvernement fédéral devrait traiter en priorité avant les prochaines élections. La priorité numéro un? Continuer d’investir dans la science publique.

Conserver les acquis de ses membres malgré le recul des conditions de travail des professionnels d’autres secteurs du marché, c’est l’un des plus grands défis auxquels l’Institut fait face aujourd’hui. Car nous ne voulons pas seulement conserver ces acquis, mais aussi les bonifier, en dépit de forces qui sapent les droits durement acquis des travailleurs.

Les attaques du gouvernement Harper visant les droits de négociation syndicale, les cotisations syndicales et les syndicats eux-mêmes ont peut-être été repoussées – pour l’instant.

Mais elles ne devraient jamais être considérées comme des menaces isolées ou des souvenirs lointains.

Comme nous le rappellent l’administration Trump aux États-Unis et le gouvernement Ford en Ontario, nous sommes toujours à une élection près d’une autre attaque contre les fonctionnaires, les lois du travail et les syndicats.

Nous serons de nouveau attaqués un jour. Nous devons nous préparer dès maintenant à réagir en position de force.

Car l’union fait la force, n’est-ce pas?

Nous devons aussi faire face à certaines dures réalités, comme l’incapacité du gouvernement fédéral à réduire son recours excessif à la sous-traitance.

Nous avons décrit ce phénomène et ses effets néfastes dans notre rapport de 2016, Programmé pour l’échec. Dans la dernière ronde de négociations, nous avons négocié des dispositions qui permettent précisément à nos membres du groupe CS de défier ce phénomène dans leur milieu de travail.

Mais il perdure.

En fait, malgré les promesses du gouvernement Trudeau, les dépenses de sous-traitance continuent de grimper. Elles sont ainsi passées de 10 milliards de dollars à la prise de pouvoir des libéraux à 12 milliards de dollars aujourd’hui.

Je crois qu’il serait très dangereux pour un syndicat comme l’Institut de négliger cette tendance à  la hausse.

La tentation pour des employeurs publics et privés de normaliser l’emploi de travailleurs contractuels moins bien rémunérés, sans pension et avec trop peu d’avantages sociaux est tout simplement trop forte.

Cela ne devrait pas être l’héritage de notre 100e anniversaire.

Nous sommes donc À l’heure des choix, le thème de notre AGA de cette année.  L’Institut va décider de la voie qu’il suivra.

Peu importe sa décision, une chose est sûre : nous devons renforcer notre syndicat pour affronter l’avenir.

Nous devons raffermir nos relations actuelles et en développer de nouvelles.

C’est mon plan et j’espère que c’est aussi le vôtre.

Peu importe ce que nous choisirons de faire, je sais que nous le ferons bien mieux ensemble.

Merci!

Discours d’ouverture de la présidente