L'Institut professionnel de la fonction publique du Canada

Après près d’une décennie de désastres causés par le système de paye Phénix, le gouvernement fédéral a annoncé sa décision d’aller de l’avant avec Dayforce, pour remplacer le déficient système de paye Phénix. Le 11 juin, le ministre Joël Lightbound a confirmé que le gouvernement entrait dans la « phase finale de création et d’essai » de la solution de gestion des ressources humaines et des payes Dayforce.

Bien que l’Institut se réjouisse de toute mesure visant à résoudre enfin la crise actuelle, nous restons prudemment optimistes et avons de sérieuses inquiétudes quant au processus de mise en œuvre.

L’étude de faisabilité révèle des lacunes importantes

La décision du gouvernement est basée sur une étude de faisabilité dont les résultats sont mitigés. Plus alarmant encore : l’étude a révélé que la capacité du gouvernement à faire fonctionner le nouveau système était insuffisante. Cette situation est d’autant plus préoccupante que le fonctionnement quotidien du système est essentiel pour garantir que nos membres soient payés correctement.

Le rapport de faisabilité lui-même le reconnaît : « Bien que le projet ait démontré la faisabilité de Dayforce, cela ne signifie pas que le gouvernement du Canada est prêt à mettre en place la solution dès maintenant. »

Encore des années de Phénix devant nous

La réalité fait réfléchir. La mise en œuvre complète ne commencera pas avant mars 2027, et la décision définitive de déploiement ne sera pas prise avant l’hiver 2027. Cela signifie que les fonctionnaires pourraient souffrir sous Phénix pendant près de quatre autres années, si des complications surviennent.

Les deux prochaines années seront principalement consacrées à des essais menés dans deux ministères et un organisme : Services publics et Approvisionnement Canada, Services partagés Canada et la Commission canadienne de sûreté nucléaire, c’est-à-dire, environ 30 000 employé·es sur un total de 431 000.

Dayforce ne résoudra pas les problèmes existants de Phénix

Un point crucial que le gouvernement continue d’ignorer : la mise en œuvre de Dayforce ne résoudra pas les quelque 370 000 opérations non résolues par Phénix qui encombrent encore le système. Ces problèmes existants doivent être résolus séparément, ce qui signifie que nos membres sont confrontés à un chaos permanent de Phénix et à des années d’incertitude avec Dayforce.

Voici la réalité actuelle de Phénix pour nos membres :

  • 500 membres de l’Institut ont encore des dossiers complexes qui sont ouverts et non résolus;
  • 32 % des fonctionnaires fédéraux ont signalé des erreurs de rémunération en 2023-2024;
  • Au moins 3,5 milliards de dollars ont été dépensés pour Phénix depuis 2017;
  • Plus de 150 millions de dollars ont été dépensés pour la seule recherche d’une solution de rechange.

Crise de la souveraineté des données

Le plus inquiétant, c’est peut-être que les données du Service de la paye fédéral du Canada seront contrôlées par Dayforce, une multinationale américaine. À l’heure où les relations entre le Canada et les États-Unis sont tendues, des questions essentielles restent sans réponse :

  • Les données canadiennes seront-elles stockées sur des serveurs américains?
  • Comment les données seront-elles protégées, en vertu des lois américaines?
  • Pourquoi la préférence n’a-t-elle pas été donnée à une entreprise canadienne?

Le problème des solutions universelles qui ne conviennent à personne

Dayforce hérite du défaut fondamental de Phénix : forcer un système unique à gérer plus de 100 ministères ayant près de 150 conventions collectives différentes. De nombreux expert·es estiment qu’il serait plus judicieux d’utiliser de multiples systèmes spécialisés plutôt que d’entasser toute cette complexité dans une seule plateforme.

Six ans de réponses évasives du gouvernement

Le gouvernement continue de refuser de prolonger l’indemnisation des dommages causés par Phénix au-delà de mars 2020. Six ans après la signature de l’entente de dédommagement 2019, il n’a même pas justifié ce refus. La solution est pourtant simple : prolonger de cinq autres années le cadre de dédommagement existant pour couvrir le préjudice qui est toujours encouru.

Nos revendications

Nous demandons ce qui suit au gouvernement :

  1. Opter pour une solution excellente, plutôt qu’« acceptable » : toutes les capacités du système doivent être pleinement fonctionnelles avant le lancement;
     
  2. Éliminer l’arriéré de Phénix : traiter les plus de 370 000 opérations en suspens avant de mettre en œuvre Dayforce;
     
  3. Protéger la souveraineté des données : garder les données canadiennes au Canada sous contrôle canadien;
     
  4. Prolonger le dédommagement : couvrir tous les dommages causés par Phénix, quelle que soit la date à laquelle ils se sont produits;
     
  5. Faire preuve d’une transparence totale en ce qui a trait aux coûts : divulguer l’ensemble des coûts de mise en œuvre au-delà des 16,9 millions de dollars initiaux.

Un regard tourné vers l’avenir

L’Institut reste déterminé à travailler avec le gouvernement pour résoudre cette crise. Toutefois, nous ne transigerons pas sur les droits de nos membres, la protection de leur vie privée et un traitement équitable. Phénix nous a appris que de bonnes intentions mal exécutées peuvent avoir des conséquences désastreuses.

Nos membres méritent mieux que des promesses et des projets pilotes. Ils et elles méritent un système de rémunération qui fonctionne, un dédommagement pour les préjudices subis et la certitude que leur employeur peut remplir son obligation la plus élémentaire : les payer correctement et à temps.

Cette décennie de désastres doit prendre fin. Nous continuerons de demander des comptes au gouvernement à chaque étape du processus.

Pour de plus amples renseignements sur les problèmes causés par Phénix et sur le travail de plaidoyer de l’Institut, consultez notre page de ressources sur Phénix. Les membres qui rencontrent des problèmes de paye doivent contacter les Services aux membres.

OTTAWA, ON, le 27 février 2025 Depuis neuf ans, le système de paye Phénix sert de triste exemple des coûts réels de la sous-traitance de services gouvernementaux essentiels. Ce qui a commencé par un contrat de 5,8 millions de dollars avec IBM a désormais grimpé à plus de 650 millions de dollars, après plus de 50 avenants contractuels, tout en échouant à assurer sa fonction première : rémunérer les fonctionnaires correctement et à temps.

« L’obsession du gouvernement pour l’externalisation a créé une spirale infernale de défaillances, déplore Sean O’Reilly, président de l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC). Après avoir englouti des centaines de millions dans IBM pour Phénix, nous assistons à une répétition de l’histoire avec 289 millions de dollars supplémentaires investis dans l’initiative ProGen, dont 171 millions versés à Dayforce pour une énième plateforme sur mesure.

Entre-temps, près de 300 000 transactions salariales sont en attente de traitement, poursuit-il. Les deux tiers de ces demandes d’intervention remontent à plus d’un an. Où est le rapport qualité-prix dont parle le gouvernement? Il ne fait que jeter de l’argent par les fenêtres. »

Les coûts exorbitants ne se limitent pas aux contrats directs. Le budget de 2024 prévoit 135 millions de dollars supplémentaires pour améliorer les RH et le système de paye de la nouvelle génération. Cela s’ajoute aux 517 millions de dollars alloués en 2023 et aux 521 millions en 2024, uniquement pour maintenir les effectifs du Centre des services de paye afin de traiter les arriérés persistants. Le gouvernement a également dépensé des millions de dollars supplémentaires pour des consultant·es, dont 27,7 millions à McKinsey pour « aider à améliorer » un système fondamentalement défaillant.

« Les fonctionnaires assurent des services essentiels sur lesquels les Canadiennes et Canadiens comptent tous les jours; or depuis neuf ans, ces employé·es doivent se battre pour recevoir leur salaire de base, souligne Nathan Prier, président de l’ACEP. Dès le départ, nous avons lancé une mise en garde contre les risques de l’externalisation d’un système aussi crucial. La course au rabais a maintenant coûté à la population canadienne plus de 3,5 milliards de dollars, et la facture continue de grimper. Nous leur avons vivement demandé de nous consulter et insisté sur l’importance de préserver l’expertise interne. Au lieu de cela, le gouvernement a supprimé 1 200 postes de conseillères et conseillers en rémunération chevronnés et les a remplacés par 550 postes dans un endroit centralisé.

Les résultats parlent d’eux-mêmes, ajoute-t-il. Trente pour cent des fonctionnaires continuent d’être victimes d’erreurs dans leur rémunération de base, et des milliers attendent des années avant que les promotions, les mutations et les prestations de retraite ne soient traitées correctement. Il est grand temps de renouveler l’entente de dédommagement pour indemniser nos membres, une promesse du Conseil du Trésor qui tarde à se concrétiser. »

Le système de paye Phénix illustre les conséquences de la priorité donnée par le gouvernement à la sous-traitance au détriment de l’investissement dans son propre personnel. Les fonctionnaires possèdent une expertise, un dévouement et une compréhension des opérations gouvernementales complexes que les entrepreneurs externes ne peuvent tout simplement pas égaler. Après neuf ans et des milliards de fonds publics gaspillés, il est temps que le gouvernement reconnaisse que pour que les services publics soient robustes, il doit investir dans ses fonctionnaires, et non dans une interminable succession de contrats externes coûteux et inefficaces.

 

À propos de l’ACEP

Avec plus de 25 000 membres, l'Association canadienne des employés professionnels (ACEP) est l'un des plus grands syndicats du secteur public fédéral. Il défend les intérêts des fonctionnaires membres des groupes Économique et services de sciences sociales (EC) et Traduction (TR), ainsi que des membres du personnel de la Bibliothèque du Parlement (BdP) et du Bureau du directeur parlementaire du budget (BDPB) et des membres civils de la GRC (groupes ESS et TRL).

À propos de l’IPFPC

L'Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC) a été fondé en 1920. Comptant plus de 70 000 membres, il est le plus grand syndicat au Canada représentant les scientifiques et professionnels œuvrant au sein de la fonction publique fédérale et de certaines administrations provinciales et territoriales.

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Source :

L'Association canadienne des employés professionnel (ACEP),  Media@acep-cape.ca

L’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC), jfillion@pipsc.ca

 

Un mémoire pour la consultation prébudgétaire est un élément clé de la défense des intérêts politiques à l’Institut. Elle fait avancer les priorités de notre syndicat, attire l’attention du ministère des Finances et des décideurs politiques et, surtout, met en lumière les questions qui touchent les membres de l’Institut.

Notre travail au fil des ans prouve que l’action de l’Institut par rapport au budget a une véritable incidence.

Par exemple, toutes les économies réalisées lors de la révision des dépenses du gouvernement en 2022 ont été obtenues en limitant l’externalisation plutôt qu’en supprimant des services — ce que nous avons fortement préconisé tout au long des années 2022 et 2023. Nous avons également appelé à la création d’un registre de la propriété effective des sociétés pour aider à prévenir l’évasion fiscale des entreprises — une intervention politique importante pour nos membres à l’ARC. L’année dernière, le gouvernement fédéral a déposé un projet de loi pour en créer un.

Cette année, nous souhaitons continuer à faire progresser les questions essentielles pour soutenir les membres de l’Institut et contribuer à la solidité des services publics.

Voici ce que demande l’Institut par rapport au budget 2024 : 

1. Recentrer les dépenses publiques et réaliser des économies en continuant à limiter l’externalisation, en développant les capacités internes et en encourageant des dispositions équitables et souples en matière de télétravail.

2. Assurer une plus grande transparence et une meilleure consultation pour l’intégration de l’IA au sein du gouvernement fédéral afin de répondre à nos préoccupations.

3. Mettre l’accent sur Phénix. Après près d’une décennie de désastres, les fonctionnaires méritent un chèque de paye auquel ils peuvent se fier.

4. Consacrer un million de dollars de soutien continu à notre outil de carrière Navigar pour aider les membres à rester agiles et prêts pour l’avenir.

5. Réparer les soins de santé au niveau fédéral grâce à des solutions entièrement financées et permanentes dans le secteur public.

6. Investir 1,4 milliard de dollars dans la recherche et le développement au sein des ministères et organismes fédéraux afin d’inverser les tendances négatives.

7. Instituer un ensemble de six politiques d’équité fiscale en réponse à l’adversité économique croissante à laquelle sont confrontés les Canadien·nes et à la structure fiscale actuelle qui permet l’évasion fiscale.

LISEZ NOTRE MÉMOIRE

Les fonctionnaires méritent d’être payés correctement et à temps. Vous avez eu trop de problèmes de paye et de stress causés par le fiasco Phénix. C’est pourquoi il faut remplacer Phénix par un système qui marche sans plus attendre.