L'Institut professionnel de la fonction publique du Canada

Guide de poche sur la divulgation d’actes répréhensibles

Table des matières

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Introduction

La fonction publique du Canada, bien qu’il s’agisse d’une institution nationale importante, peut être le théâtre d’actes répréhensibles au même titre que n’importe quel autre milieu de travail dans le monde – ce qui est d’ailleurs le cas! De temps à autre, les grands titres des quotidiens font état d’abus ou de mauvaise utilisation de fonds publics.

Bien qu’ils soient rares, de tels actes répréhensibles constituent des violations de la confiance du public dans les méthodes du gouvernement. Par le passé, les fonctionnaires qui osaient signaler de tels actes firent l’objet de mesures disciplinaires pouvant parfois même aller jusqu’à leur congédiement. Voilà donc pourquoi les fonctionnaires ont tendance à ne rien dire lorsqu’ils prennent connaissance de telles situations.

Une bonne mise en application de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles (LPFDAR) devrait par conséquent augmenter la confiance du public dans les organisations du secteur public, en plus de mettre en place et de renforcer une culture du milieu de travail de choix reposant sur l’éthique.

Historique

Pendant une bonne quinzaine d’années, l’Institut et d’autres syndicats du secteur public n’ont cessé de faire campagne en faveur d’un texte de loi protégeant les « divulgateurs d’actes répréhensibles », soit les fonctionnaires qui dénoncent les mauvaises utilisations de fonds ou les actes répréhensibles au sein du gouvernement fédéral.

La première loi de ce genre a été présentée par le Parti libéral et reçut la sanction royale le 25 novembre 2005, mais du fait du déclenchement d’élections cette législation n’a jamais été mise en œuvre. Peu de temps après son élection, le Parti conservateur a à son tour présenté une version toutefois modifiée de cette loi.

La LPFDAR a donc été modifiée par la Loi fédérale sur la responsabilité qui a reçu la sanction royale le 12 décembre 2006. La Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles est entrée en vigueur le 15 avril 2007.

Quel est l’objet de la LPFDAR?

La Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles (LPFDAR), communément appelée Loi sur la dénonciation, encourage les employés du secteur public à signaler ce qu’ils pensent être des actes fautifs graves, et les protège contre des représailles lorsqu’ils agissent ainsi. Cette loi prévoit par ailleurs un processus juste et objectif pour les personnes contre lesquelles des allégations sont déposées.

Qui est assujetti à la LPFDAR?

La LPFDAR s’applique à tous les employés des ministères, agences, bureaux, tribunaux, employeurs distincts, sociétés d’État mères, administrations des tribunaux, ainsi qu’aux administrateurs généraux et à la Gendarmerie royale du Canada. Elle ne s’applique toutefois pas aux ministres ni aux membres de leur personnel, aux membres des conseils d’administration des sociétés d’État, au Parlement et à ses institutions et juges fédéraux.

D’autres institutions comme le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), le Centre de la sécurité des télécommunications (CST) et les Forces canadiennes sont également exemptées de l’application de cette loi mais sont néanmoins tenus de mettre en place des programmes comparables de protection contre les divulgations.

Quelles sont les responsabilités de l’employeur?

Tout administrateur général de la fonction publique fédéral est dans l’obligation de désigner un agent supérieur et de créer un mécanisme interne de divulgation. Chaque organisation assujettie à la LPFDAR doit créer ses propres procédures pour recevoir et traiter les divulgations. Les petites organisations peuvent être exemptées, en quel cas les allégations d’actes fautifs devraient être directement adressées au Commissariat à l’intégrité du secteur public du Canada (CISP).

La loi exige par ailleurs que le Conseil du Trésor élabore un Code de conduite pour la fonction publique fédérale. Qui plus est, les administrateurs généraux des ministères et agences fédéraux assujettis à la loi doivent mettre en place leurs propres codes, lesquels doivent impérativement être conformes à celui du CT, mais être néanmoins adaptés à leurs propres besoins.

Qu’est-ce qu’un acte répréhensible?

La LPFDAR définit un acte répréhensible comme étant la contravention d’une loi, l’usage abusif des fonds ou des biens publics, les cas graves de mauvaise gestion dans le secteur public, la contravention grave d’un code de conduite, le fait de causer, par action ou omission, un risque grave et précis pour la vie, la santé ou la sécurité humaines ou pour l’environnement, et le fait de sciemment ordonner ou conseiller à une personne de commettre un acte répréhensible.

Qu’est-ce que la divulgation?

La divulgation est une situation où un fonctionnaire dénonce des actes fautifs graves qui ont eu lieu et qui peuvent avoir des répercussions sur la vie, la santé et la sécurité de Canadiens ou l’environnement, par exemple prendre la parole contre les coûts excessifs de rénovation de bureau, l’affectation par des gestionnaires de contrats aux membres de leur famille, la mise sur le marché d’un nouveau médicament avant sa mise à l’essai, etc.

La divulgation peut être soit protégée ou anonyme.

Types de divulgation

Par divulgation protégée, on entend la divulgation qui est faite de bonne foi par un fonctionnaire,

  • en vertu de la LPFDAR,
  • dans le cadre d’une procédure parlementaire,
  • sous le régime d’une autre loi fédérale, ou
  • lorsque la loi l’y oblige.

La protection intégrale de la loi n’est disponible qu’aux fonctionnaires qui ont fait des divulgations protégées ou qui ont, de bonne foi, collaboré à une enquête sur une divulgation.

La divulgation anonyme est autorisée en vertu de la loi; toutefois, du fait que le plaignant ne désire pas être identifié, il ne peut bénéficier de la protection contre des représailles ni de la protection de l’information accordée par la loi.

La divulgation par une tierce partie n’existe pas.

Une divulgation peut-elle être faite aux médias?

Oui, mais seulement dans les cas où il n’y a pas suffisamment de temps pour procéder selon le processus interne normal et aussi uniquement si le fonctionnaire est convaincu qu’il est en présence d’une violation sérieuse de la loi, ou d’un risque imminent de danger substantiel et spécifique à la vie, à la santé et à la sécurité des personnes ou de l’environnement.

Nous recommandons fortement qu’un membre qui envisage d’agir ainsi, consulte son bureau régional de l’Institut avant de procéder.

De quelle manière un fonctionnaire peut-il faire une divulgation?

Lorsqu’un fonctionnaire prend connaissance d’un acte répréhensible, il peut le rapporter au niveau interne à son superviseur ou bien à l’agent supérieur désigné à cette fin, ou encore s’adresser directement au Commissariat à l’intégrité du secteur publique.

Toute plainte fera l’objet d’une enquête ainsi que de recommandations sur les mesures rectificatives à prendre, auprès de l’administrateur général concerné.

Divulgation faite à un superviseur

Les superviseurs représentent le niveau le moins élevé auquel une plainte d’acte répréhensible peut être soulevée. Pour pouvoir s’occuper de telles questions, les superviseurs doivent être pleinement au courant :

  • de la définition donnée dans la loi aux actes répréhensibles,
  • du fait que la divulgation par un fonctionnaire entraîne la protection de l’information liée à la divulgation et déclenche la protection contre des représailles contre le plaignant, et
  • de l’identité et du rôle de l’agent supérieur dans leur organisation.

Ils doivent aussi recueillir des données statistiques et autres renseignements que pourrait leur demander l’administrateur général pour son rapport à l’Agence de la fonction publique du Canada concernant les divulgations faites au sein de l’organisation en vertu de la loi.

Dès réception d’une plainte d’actes répréhensibles, le superviseur peut se pencher sur la question ou bien la transmettre à l’agent supérieur de l’organisation. Le superviseur devrait par ailleurs rappeler au plaignant les dispositions concernant la confidentialité des renseignements et la protection contre les représailles en vertu de la loi, et lui préciser les prochaines étapes du processus. Il incombe au superviseur de protéger l’identité du plaignant ainsi que les renseignements qui le concernent, dans la mesure du possible, et d’agir dans le cadre des pouvoirs dont il dispose pour protéger le plaignant contre des représailles.

Divulgation faite à l’agent supérieur de l’organisation

La liste des agents supérieurs se trouve sur le site www.tbs-sct.gc.ca/chro-dprh/ve-fra.asp. Veuillez consulter cette liste pour savoir qui est votre agent supérieur et lui faire parvenir vos allégations.

L’agent supérieur examinera la divulgation pour déterminer s’il y a suffisamment de raisons pour faire enquête, et informera le plaignant, par écrit, de ses conclusions. Si l’agent supérieur décide d’aller de l’avant, il s’assurera alors que l’enquête est effectuée par un enquêteur neutre et professionnel, respectant les droits des plaignants et des auteurs des actes répréhensibles. Il protégera l’identité de toutes les personnes concernées par la plainte.

L’agent supérieur examinera ensuite les résultats de l’enquête, puis préparera des recommandations de suivi et fera directement rapport à l’administrateur général de l’organisation concernée. Il avisera par écrit le plaignant des résultats de l’enquête et des mesures correctives qui seront prises.

En aucun cas l’agent supérieur ne pourra renvoyer la divulgation au CISP. Cette décision revient uniquement à l’employé.

Divulgation faite au Commissariat à l’intégrité du secteur public (CISP)

Un fonctionnaire peut déposer directement une plainte au CISP ou bien lui communiquer une situation s’il est convaincu qu’elle n’a pas été traitée convenablement ni adéquatement au niveau de son organisation.

Le CISP a le droit de refuser de s’occuper d’un cas de divulgation ou d’entreprendre une enquête, et aussi celui de mettre fin à une enquête s’il est d’avis que la question devrait être abordée dans le cadre d’une autre tribune (par exemple la procédure de règlement des griefs), que l’affaire n’est pas suffisamment importante ou que la divulgation n’a pas été faite de bonne foi.

Le CISP est investi des pouvoirs d’enquêter, de faire rapport sur les conclusions, d’avancer des recommandations sur les mesures correctives à prendre à l’administrateur général concerné, et d’examiner les rapports sur les mesures prises en réponse à ses recommandations.

Le CISP protégera, dans la mesure du possible, l’identité de toutes les personnes concernées. Il peut également aviser d’autres personnes de l’enquête, y compris celles dont les actes ont été mis en doute. Il n’est pas pour autant tenu d’organiser des auditions, mais la personne accusée ou l’administrateur général peut avoir la possibilité de répondre aux allégations.

Le CISP rédigera un rapport sur l’enquête menant à une décision d’acte répréhensible, et peut demander à l’administrateur général de l’avertir dans un délai bien défini des mesures correctives qui ont été prises ou des raisons pour lesquelles aucune mesure n’a été prise.

En outre, le CISP fait rapport tous les ans au Parlement et peut publier des rapports spéciaux au Parlement, si celui¬-ci lui en fait la demande.

Qu’entend-on par « représailles »?

Par « représailles », on entend l’une ou l’autre des mesures ci-après prises à l’encontre d’un fonctionnaire pour le motif qu’il a fait une divulgation protégée ou qu’il a collaboré de bonne foi à une enquête menée sur une divulgation, soit toute sanction disciplinaire, sa rétrogradation, son licenciement, toute mesure portant atteinte à son emploi ou à ses conditions de travail, ou toute menace à cet égard.

Les représailles sont-elles autorisées?

Comme nous l’avons déjà dit, l’objet de la LPFDAR est d’encourager les employés du secteur public à se manifester s’ils sont convaincus que des actes fautifs graves ont lieu. Cette loi offre la protection à tous les employés (et non pas uniquement aux fonctionnaires) qui fournissent des renseignements sur des actes répréhensibles. Cette protection est également offerte aux employés qui collaborent à des enquêtes sur des actes répréhensibles possibles. La loi prévoit par ailleurs un processus juste et objectif pour les personnes contre lesquelles des allégations sont faites.

Il est interdit aux employeurs d’exercer des représailles contre les employés et les sous-traitants qui dénoncent des actes répréhensibles.

De quelle manière un employé peut-il être protégé des représailles?

Les administrateurs généraux doivent protéger les employés contre des représailles lorsqu’ils ont fait une divulgation de bonne foi, ce qui inclut la protection de l’identité de l’employé divulgateur et aussi celle des autres personnes concernées par la divulgation, en conservant les dossiers sur la divulgation séparément des dossiers existants, et en ne révélant l’information qu’à l’enquêteur ou à l’agent supérieur.

Que se passe-t-il si l’identité de l’auteur de la divulgation est révélée?

Au cas où l’identité d’une personne qui est l’auteur d’une divulgation ou d’un témoin devient connue sur les lieux de travail, des mesures doivent être prises pour éviter des représailles possibles, par exemple la réaffectation temporaire de l’employé à d’autres fonctions.

Que peut-on faire si des représailles ont lieu?

L’administrateur général doit immédiatement prendre des mesures. L’employé doit
être informé de ses options, y compris l’accès éventuel à des conseils juridiques. L’administrateur général peut aussi réaffecter l’employé concerné qui est touché par des représailles, et prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer sa protection.

Un employé qui est assujetti à des représailles peut se prévaloir de la procédure de règlement des griefs ou d’autres méthodes de recours, ou encore faire une plainte au CISP. Ce dernier recevra les plaintes de représailles dans les 60 jours suivant la date à laquelle l’employé prend connaissance des représailles en question. Si la plainte est accueillie, un enquêteur sera alors nommé. Un conciliateur pourrait aussi être nommé pour essayer d’en arriver à une entente.

Lorsque l’enquêteur remet son rapport au CISP, ce dernier peut le transmettre au Tribunal de la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles (TPFDAR) pour qu’il détermine s’il y a vraiment eu des représailles.

Si le Tribunal, composé de juges de la Cour fédérale ou d’une Cour supérieure provinciale, détermine qu’il y a bien eu des représailles, il peut ordonner des mesures de réparation, notamment les suivantes :

  • permettre au plaignant de reprendre son travail,
  • le réintégrer ou lui verser une indemnité, si sa réintégration n’est pas possible,
  • lui verser une indemnité équivalant au plus à la rémunération qui lui aurait été payée s’il n’y avait pas eu de représailles,
  • annuler toute sanction disciplinaire ou autre prise à son endroit,
  • lui accorder le remboursement des pertes financières qui découlent directement des représailles,
  • l’indemniser jusqu’à concurrence de 10 000 $ pour les souffrances et douleurs découlant des représailles dont il a été victime.

Quelles sont les sanctions contre les personnes trouvées coupables d’actes répréhensibles?

Les sanctions dépendent de la gravité et du type de l’acte répréhensible. En sus des sanctions exigées par la loi, les administrateurs généraux disposent des pouvoirs nécessaires pour imposer des sanctions administratives et disciplinaires, par exemple : remboursement de sommes d’argent, sanctions financières, réprimandes, suspension, rétrogradation, cessation d’emploi.

Ces pénalités ne peuvent faire l’objet d’un grief.

Que se passe-t-il si les allégations d’actes répréhensibles ne sont pas fondées?

Si les allégations étaient valides mais qu’elles ont été jugées non fondées ou insuffisantes pour que d’autres mesures soient prises, dans ce cas le dossier est tout simplement clos.

Si les allégations sont jugées avoir été faites sous la forme de représailles contre un autre employé ou un employeur, le fonctionnaire divulgateur fera l’objet de sanctions disciplinaires.

Que se passe-t-il si l’employé a encouru des frais juridiques dans le cours de la divulgation?

Le CISP peut offrir un accès gratuit mais limité à un conseiller juridique pour obtenir des conseils, jusqu’à concurrence de 1 500 $ pour les employés qui n’ont pas accès à des conseils juridiques. Ce montant peut aller jusqu’à 3 000 $ dans des circonstances exceptionnelles. Il est toutefois disponible uniquement aux personnes qui n’ont pas autrement accès à des conseils juridiques gratuits tels que ceux offerts par l’Institut professionnel. Voilà pourquoi il est important que les membres s’adressent à l’Institut avant de faire des allégations.

Le CISP est-il tenu de rendre des comptes?

Effectivement, le CISP doit faire rapport au Parlement dans les 60 jours suivant la date à laquelle un acte répréhensible a été révélé. Les administrateurs généraux quant à eux doivent faire publiquement rapport des conclusions de l’acte répréhensible.

Le Commissaire à l’intégrité du secteur public du Canada (CISP) doit présenter un rapport annuel au Parlement sur les divulgations dans toute la fonction publique.

Quel genre de formation est offerte aux fonctionnaires sur ce thème?

Il incombe à l’Agence de la fonction publique du Canada de fournir des outils d’apprentissage et de communication afin d’aider les organisations à répondre à leurs obligations en vertu de la LPFDAR. Le Bureau des valeurs et de l’éthique de la fonction publique, en collaboration avec les parties prenantes (celles assujetties à la loi), s’assure que les fonctionnaires connaissent la loi, utilisent le mécanisme qu’elle offre pour rapporter les actes répréhensibles, et se sentent en sécurité et protégés lorsqu’ils font des divulgations.

Quel est le rôle de l’institut dans ce processus?

Les agents négociateurs doivent être consultés avant qu’un Code de conduite ne soit établi.

Les fonctionnaires peuvent consulter le syndicat à tout moment durant le processus de divulgation, que ce soit à titre de divulgateurs, d’accusés ou de témoins. Ils peuvent être représentés ou accompagnés par un représentant syndical lorsqu’ils répondent à    des allégations ou qu’ils sont assignés par le CISP à fournir de l’information.

Les employés ont aussi le droit d’être représentés par le syndicat durant tout le processus de plainte contre des représailles.

Que peuvent faire les délégués syndicaux sur les lieux de travail?

Les délégués syndicaux doivent s’assurer que l’employeur informe tous les employés :

  • de la définition d’acte répréhensible dans la loi,
  • de la différence entre une divulgation et les autres formes de plaintes,
  • du nom de l’agent supérieur de l’organisation,
  • de la marche à suivre pour faire une divulgation en vertu de la loi, et
  • des protections contre les représailles offertes aux fonctionnaires divulgateurs.

Où les membres peuvent-ils s’adresser pour obtenir de l’information sur la divulgation?

Ils peuvent se procurer des renseignements et autres conseils spécifiques auprès de l’agent des relations du travail au bureau régional de l’Institut, de leur agent supérieur ou du Commissariat à l’intégrité de la fonction publique à www.psic-ispc.gc.ca, ou au numéro 613-941-6400 ou 1-866-941-6400

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