Des documents internes obtenus par l’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) grâce à des demandes d’accès à l’information révèlent que le gouvernement n’a pas tenu compte de ses propres preuves que le télétravail stimule la productivité. Le gouvernement a également analysé des tendances et des modèles de travail flexible avant de mettre en œuvre un mandat de télétravail controversé qui ne tient pas compte des avantages de ces tendances et modèles. Et même s’il prévoyait des difficultés et des réactions négatives importantes, le gouvernement a ignoré ces préoccupations et a préféré aller de l’avant avec son mandat rigide qu’il savait voué à l’échec.
Un refus d’adaptation
Les documents confirment ce que l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC) et d’autres syndicats affirment depuis le début, à savoir que le mandat de télétravail est motivé par des enjeux politiques et non par la productivité.
L’hypocrisie du gouvernement est stupéfiante. Il y a deux ans à peine, il vantait le télétravail, affirmant qu’il s’agit d’un élément clé d’une fonction publique moderne et efficace. L’un des principaux enseignements qu’il a tirés d’un projet pilote, c’est qu’aucune solution ne convient à tout le monde. Aujourd’hui, il a opéré un virage à 180 degrés, et comme le révèlent les documents relatifs à l’accès à l’information, il l’a fait sans aucune logique, ni donnée, ni justification. C’est un refus embarrassant de s’adapter aux réalités de la main-d’œuvre d’aujourd’hui.
Le contrôle sans le leadership
Si le gouvernement avait réellement la cohérence et l’harmonisation à cœur, il aurait consulté les parties prenantes et aurait examiné l’éventail plus large des modèles de travail flexibles. Au lieu de cela, il a adopté une approche paresseuse et coercitive qui ne profite à personne et risque d’éroder la confiance et la productivité.
En obligeant les employé·es à retourner au bureau pendant un nombre déterminé de jours, sans tenir compte des exigences de leur travail ou de leurs situations personnelles, le gouvernement joue clairement un jeu de pouvoir. C’est un moyen pour la direction de réaffirmer son contrôle et de surveiller les travailleur·ses, et ce, même au détriment de l’efficacité, du moral et du maintien en poste.
Si le gouvernement s’engageait véritablement en faveur d’une fonction publique performante et moderne, il adopterait les avantages avérés des modalités de télétravail flexibles. Il s’accroche plutôt à une mentalité dépassée de commandement et de contrôle qui accorde la priorité au présentéisme plutôt qu’aux résultats. Cette approche rigide ne tient pas compte de la diversité des besoins et des contraintes des différents ministères et risque de susciter une répétition des erreurs du passé.
Parallèles avec Phénix
La mise en œuvre imprudente du mandat de retour au bureau par le gouvernement présente d’étranges similitudes avec le fiasco du système de paye Phénix. Dans les deux cas, il s’est empressé de mettre en œuvre des changements majeurs sans analyse, consultation ou prise en compte adéquates des conséquences pour le personnel.
De plus, comme dans le cas de Phénix, le gouvernement ignore les signaux d’alarme et les conseils d’expert·es dans sa poursuite obstinée de son option préférée.
Les documents du SCT révèlent qu’il s’attendait à des difficultés et à des réactions négatives importantes, mais qu’il n’a pas tenu compte de ces préoccupations, ce qui est une façon de procéder à la fois familière et effrayante.
La débâcle de Phénix nous a appris que le fait d’imposer une approche unique à l’ensemble de la fonction publique est une recette qui mène au désastre. Les ministères ont des contraintes et des besoins divers qui ne peuvent être ignorés. En imposant de manière rigide des politiques de retour au bureau, le gouvernement répète les erreurs du passé.
La transparence et une consultation sérieuse auraient permis d’éviter une grande partie des dommages causés par Phénix. Pourtant, une fois de plus, le gouvernement prend des décisions radicales qui ont des répercussions sur des milliers de travailleur·ses avec un préavis minimal et sans véritable dialogue. N’a-t-il rien appris des échecs précédents?
Révoquer le mandat
Il est temps que le gouvernement écoute les préoccupations des fonctionnaires et de leurs syndicats. Le mandat de retour au bureau doit être réexaminé et une approche plus souple, fondée sur des données probantes, doit être adoptée. Ainsi, nous pourrons construire une fonction publique véritablement moderne et efficace, qui profitera à la fois aux fonctionnaires et à la population du Canada qu’ils/elles servent.