L'Institut professionnel de la fonction publique du Canada

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Le groupe Systèmes d’ordinateurs (CS) de l’Institut travaille d’arrache-pied pour faire appliquer l’article 30 de sa convention collective. Cet article stipule que l’employeur doit faire un effort raisonnable pour recourir aux employés en poste ou embaucher des employés temporaires ou permanents à temps plein, selon les besoins, avant de sous-traiter du travail à des consultants ou à des sociétés privées. L’embauche de consultants par le gouvernement pour effectuer du travail informatique coûte cher aux Canadiennes et aux Canadiens et contribue à l’érosion de la mémoire institutionnelle. Malheureusement, malgré les nouvelles dispositions de convention collective à cet égard, la sous-traitance d’importantes activités informatiques gouvernementales a encore cours dans presque tous les ministères, au mépris flagrant de l’article 30. Affaires mondiales est l’un des ministères les plus problématiques à cet égard. Le présent rapport donne un regard sur les griefs de principe déposés contre le Ministère entre janvier 2018 et mars 2020 par suite de la sous-traitance du travail informatique gouvernemental qui aurait pu être effectué à l’interne. Les données qu’il comprend montrent que le Ministère ne respecte pas la convention collective.

Pour en savoir plus sur le groupe CS, l’article 30 et l’équipe d’action sur la sous-traitance

Après avoir analysé 149 offres ou contrats, le groupe CS en a remis 139 en question, envoyant conséquemment autant de courriels au Ministère pour lui demander de décrire l’effort raisonnable qu’il a déployé, conformément aux dispositions sur la sous-traitance de la convention collective.

Refus de divulgation

Le Groupe, n’ayant reçu que quatorze réponses à ses 139 courriels, a présenté 135 griefs durant la période visée par la présente analyse. Parmi les réponses reçues, le Ministère a tenté de justifier la sous-traitance du travail informatique en évoquant plusieurs raisons :

  • il n’y avait pas de poste auquel un employé permanent interne pouvait être affecté;
  • il n’y avait pas de compétences à l’interne pour effectuer le travail;
  • il fallait adjoindre des sous-traitants au personnel pour disposer d’un effectif plus nombreux;
  • il y avait un problème de recrutement et de maintien en poste dans le secteur d’activité CS en question.

La sous-traitance se traduit par des coûts plus élevés et des services de moindre qualité pour la population — moins de transparence, moins de responsabilités ainsi qu’une perte de compétences et de connaissances organisationnelles. L’étude du cas de ce ministère est un exemple frappant de l’importance du respect de l’article 30.

Le coût élevé de la sous-traitance

Parmi les appels d’offres et les contrats examinés, 59 n’auraient pas apporté d’avantage apparent au Ministère, compte tenu des ressources humaines déjà disponibles à l’interne. Les contrats avaient été classés comme des contrats de palier 1, ce qui signifie que leur valeur était inférieure ou égale à 3,75 millions de dollars chacun. La valeur des 76 autres contrats que nous avons pu trouver se chiffrait à plus de 40 millions de dollars.

Les besoins récurrents doivent être pourvus par des postes permanents, et non par des contrats de sous-traitance :

Bien que la plupart des contrats aient été conclus pour une période d’un an, bon nombre d’entre eux comportaient des dispositions de renouvellement susceptibles de les prolonger d’une année jusqu’à un total de six ans. De nombreux contrats avaient pour objet de remplacer un autre sous-traitant qui avait fait le même travail. Lorsqu’un besoin en ressources humaines est récurrent, il faut y répondre en embauchant un employé permanent.

Types de travail donné en sous-traitance

Le nombre de ressources sollicitées dans ces contrats était de 490 pour la période visée par l’analyse. Il est évident que ce nombre élevé met en lumière le manque de personnel informatique nécessaire pour répondre aux besoins du Ministère. Les postes les plus sous-traités par Affaires mondiales étaient ceux de testeur, d’analyste, de développeur d’applications et de gestionnaire de projets. Parmi les autres tâches normalement acquittées par les CS mais qui ont été sous-traitées, mentionnons l’architecture, la sécurité, la programmation, le service d’assistance, l’infrastructure, l’administration, les bases de données, le Web et la rédaction technique.

Manque d’efforts en matière de dotation à AMC

Les graphiques suivants montrent qu’AMC n’a pas tenté de pourvoir les postes informatiques qu’il a sous-traités.

Pendant la période à l’étude, le Ministère a publié 24 offres pour trouver du personnel dans les domaines de l’architecture, de la sécurité, de la programmation, du service d’assistance, de l’administration, de l’infrastructure, de l’analyse, de la gestion de projets et du soutien technique, ainsi que pour des chefs d’équipe.

La plupart des emplois étaient de niveau CS-02, CS-03 et CS-04. Moins de la moitié des offres d’emploi indiquaient que le Ministère créerait un bassin de candidats pour ses besoins futurs. Ces offres étaient principalement internes et le Ministère n’a pas essayé de pourvoir des postes permanents à temps plein pour répondre à ses besoins.

Par exemple, il a sous-traité 20 ressources pour du travail de dépannage informatique. Malheureusement, pendant la même période, il n’a pas publié d’avis pour pourvoir des postes permanents à temps plein chargés d’effectuer le même travail.

offres d'emploi à Affaires mondiales de novembre 2017 à mars 2020

Travail sous-traité

La convention collective doit être respectée.

L’IPFPC est déçu par le manque de réponses à ses demandes d’information. Les griefs causés par l’absence de réponses sont très nombreux à AMC et imposent un fardeau de travail inutile tant à l’IPFPC qu’au Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada (SCT).

L’IPFPC considère les appels d’offres externes visant des postes permanents à temps plein comme un moyen essentiel de pourvoir les postes pour lesquels les compétences requises sont difficiles à trouver dans la fonction publique. Notons que de tels appels externes constitueraient un effort raisonnable au sens de l’article 30.

Nous sommes aussi déçus de constater qu’AMC propose plusieurs fois des contrats pour le même type d’activités. La nature répétitive de ces contrats indique que le Ministère pourrait avoir un besoin permanent justifiant l’embauche d’un employé régulier à temps plein.

Le présent rapport interne confirme pourquoi il s’agit de l’un des ministères les moins respectueux de l’article 30 de la convention collective du groupe CS. L’IPFPC s’engage à faire la lumière sur ce problème et à utiliser les moyens nécessaires pour s’assurer que la convention collective du Groupe est respectée par tous les ministères.

Les coûts réels de la sous-traitance sont trop élevés : argent gaspillé, mauvaises pratiques d’embauche, érosion des capacités et problèmes de sécurité. Il est temps d’y mettre un terme. Pour en savoir plus sur notre lutte contre la sous-traitance : https://ipfpc.ca/fr/nouvelles-et-enjeux/la-sous-traitance.

 

Le groupe CS, l’article 30 et l’équipe d’action sur la sous-traitance

Le groupe CS représente environ 17 319 travailleurs des technologies de l’information (TI) employés par le Conseil du Trésor du Canada. Les membres du Groupe sont répartis dans 62 ministères fédéraux et dans chacune des ambassades canadiennes; ils participent à des missions opérationnelles dans le monde entier pour le ministère de la Défense nationale (MDN) et l’Agence spatiale canadienne (ASC).

Les technologies de l’information ont évolué et sont essentielles à toutes sortes de professions dans notre société. Le bon fonctionnement du gouvernement fédéral et de la collectivité dépend des systèmes et des logiciels qui sont étudiés, gérés et maintenus par les membres du Groupe. Ils protègent non seulement les systèmes, mais aussi les données qu’ils comprennent. La portée et l’importance de leur travail ont crû à une vitesse exceptionnelle, au rythme de l’évolution technologique propre à notre époque. Ils assurent des services de soutien, le développement d’architectures et d’applications, les opérations d’infrastructures, la gestion des bases de données et des projets, et la création de systèmes spécialisés. On les trouve un peu partout, des services de dépannage informatique aux solutions d’intelligence artificielle.

Tableau : Répartition des membres du groupe CS par ministère — Ministères comptant au moins 300 employés du groupe CS au 31 mars 2018

Ministère

 

Shared Services Canada / Services partagés Canada

3 595

National Defence / Défense nationale

1 904

Employment and Social Development Canada /

Emploi et Développement social Canada

1 454

Statistics Canada / Statistique Canada

789

Public Services and Procurement Canada /
Services publics et Approvisionnement Canada

650

Canada Border Services Agency / Agence des services frontaliers du Canada

624

Global Affairs Canada / Affaires mondiales Canada

455

Environment and Climate Change Canada /
Environnement et Changement climatique Canada

378

Health Canada / Santé Canada

371

Correctional Service Canada / Service correctionnel Canada

352

Innovation, Science and Economic Development Canada /
Innovation, Sciences et Développement économique Canada

342

Immigration, Refugees and Citizenship Canada /
Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada

327

Fisheries and Oceans Canada / Pêches et Océans Canada

300

 

Pendant la ronde de négociations de 2014, l’Institut a privilégié certains enjeux propres au groupe CS : la sous-traitance du travail dont devraient normalement s’acquitter les employés de l’État, le rôle des membres du Groupe dans la préservation des compétences et des connaissances institutionnelles en matière de changement technologique, ainsi que le règlement des problèmes de recrutement et de maintien en poste de professionnels hautement qualifiés en TI. L’article 30 de la convention collective du Groupe CS, intitulé « Sous-traitance », a été modifié.

L’équipe d’action sur la sous-traitance

Afin de s’assurer du respect de la nouvelle mouture de l’article 30, le Groupe a formé l’équipe d’action sur la sous-traitance (EAST). L’EAST examine chaque contrat lié aux TI publié par les ministères qui emploient des membres du Groupe. Après avoir étudié chaque contrat et cherché à savoir si le Ministère a respecté ou non les dispositions de la convention collective, l’EAST décide si un grief de principe doit ou non être déposé. Depuis sa mise sur pied en janvier 2018 jusqu’en septembre 2020, l’équipe a analysé plus de 1 850 offres et contrats de services.